Partage d'évangile quotidien
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Premiers adversaires ?

Ven. 17 Janvier 2014

Marc 2, 1-12 traduction : Comparer plusieurs traductions sur le site 4evangiles.fr Lire le texte grec et sa traduction (anglaise) mot-à-mot sur le site interlinearbible.org

Il entre de nouveau à Capharnaüm, après des jours. Ils entendent qu'il est au logis. Ils se rassemblent, nombreux, si bien qu'il ne reste plus de place, même aux abords de la porte ! Et il leur disait la parole. 

Ils viennent et amènent devant lui un paralytique qu'ils portent à quatre. Ne pouvant lui présenter, à cause de la foule, ils défont le toit, où il se trouvait. Ayant foré un trou, ils laissent aller le grabat où le paralytique est étendu.  Jésus voit leur foi et dit au paralytique : « Enfant, tes péchés sont remis. » 

Or, certains des scribes sont là, assis. Ils font des réflexions dans leurs cœurs : « Quoi ! Celui-là parle ainsi ? Il blasphème ! Qui peut remettre les péchés, sinon l'unique : Dieu ? » Aussitôt, Jésus connaît en son esprit qu'ils font ainsi des réflexions en eux-mêmes. Il leur dit : « Pourquoi faire ces réflexions en vos cœurs ? Quel est le plus facile ? Dire au paralytique : “Tes péchés sont remis“, ou dire : “Dresse-toi, prends ton grabat et marche” ? Eh bien, pour que vous sachiez que le fils de l'homme a pouvoir de remettre les péchés sur la terre... »  il dit au paralytique : « À toi, je dis : dresse-toi ! Prends ton grabat et va dans ton logis. » 

Il se dresse, aussitôt prend le grabat et sort devant tous, si bien qu'ils sont stupéfaits, tous. Ils glorifient Dieu et disent : « Cela, jamais nous ne l'avons vu ! » 

 

 

Les dix commandements, par He-Qi

 

 

voir aussi : Hommes de pouvoir, Vues de l'esprit, Solution de facilité ?, Entrée par effraction

De nouveau Marc nous parle de Jésus, seul, qui revient à Capharnaüm, il ne précise pas "avec les disciples". Peut-être est-ce sous-entendu ? mais d'un autre côté, pour l'instant Marc ne nous a toujours parlé que de la bande des quatre, Pierre, André, Jacques et Jean, il n'y a pas encore les douze. Il est fort possible que, dans un premier temps, les disciples ne suivaient pas encore systématiquement Jésus partout où il allait. Marc nous a décrit leur appel, mais si on suit Jean, ce n'est pas Jésus qui a appelé les disciples, ce sont eux qui ont décidé de le suivre. Dans ce cas, il est normal que chacun décide à chaque fois, selon ses obligations par ailleurs, s'il va partir pour cette nouvelle virée ou pas, et puis peut-être même ne pas rester tout du long de la tournée, revenir plus tôt, ou rejoindre en cours de route, etc... Je pense, personnellement, que c'est plutôt comme ça que les choses se sont passées. Il n'y avait pas de directives, il n'y a pas vraiment eu de groupe constitué et officialisé de ceux qui auraient été présents tout le temps, tout du long du ministère de Jésus. Il y a eu des habitués, des plus assidus que d'autres, mais, au moins dans les débuts, je ne crois pas que les quatre aient été vingt quatre heures sur vingt quatre avec Jésus. Et puis, on ne peut pas exclure non plus que Jésus ait souhaité aussi, parfois, aller seul. Il est souvent décrit comme se retirant à l'écart, dans la solitude, il serait bien curieux qu'a l'une ou l'autre de ces occasions il n'ait pas fait de rencontres auxquelles aucun des disciples attitrés n'ont assisté. Et il serait curieux aussi qu'aucune de ces rencontres ne l'ait entraîné parfois plus loin, toujours sans les 'officiels'. Bref, l'image que nous avons en tête des disciples toujours avec Jésus dès le moment où ils ont été appelés n'est que celle que ces disciples ont voulu nous donner, sans aucune autre garantie.

Mais revenons à Capharnaüm. Nous sommes dans une époque où la réputation de Jésus est déjà fermement établie dans cette ville : quand il revient, le téléphone arabe fonctionne rapidement, et beaucoup de monde se masse autour de la maison de Pierre et André. La ville, y compris ses autorités religieuses, est fière de son enfant, qu'il soit adoptif ou pas. Il n'y a pas de conflit avec les pharisiens de la synagogue, dans les premiers temps. Ce sont eux qui ont donné son instruction religieuse au jeune Jésus, ils sont plutôt d'accord avec le message de Jean Baptiste, qui attaque principalement la puissance des sadducéens. Que Jésus se soit fait son disciple ne les a pas gênés, et qu'il revienne et se mette à manifester des signes 'miraculeux', ils en sont ravis. C'est leur poulain, qui va manifester haut leurs couleurs. Et Jésus, toujours dans les premiers temps, n'avait pas encore de discours qui puisse les choquer. Ce sont les évangélistes, qui écrivent bien plus tard, à une époque où le message de Jésus a fini d'atteindre son plein développement d'une part, et où les relations avec les pharisiens se sont mises à se jouer sur un mode beaucoup plus concurrentiel, les évangélistes, donc, ont eu tendance à vouloir nous présenter un Jésus égal à lui-même du début à la fin, créant cette erreur de perspective dont nous avons bien du mal à nous débarrasser.

Ainsi, dans cet épisode, il n'y a même pas eu, en réalité, de vrai désaccord, sur le fond. Il y a plutôt eu, tout au plus, un quiproquo, mais que le récit, fait plusieurs décades après, a présenté de manière à lui donner cette tournure. Car pour personne il ne faisait de doute que les guérisons et exorcismes signifiaient forcément aussi remise des péchés. Il n'y avait pas de différence, dans la mentalité de l'époque. Être malade, que ce soit physiquement ou psychiquement, étant une conséquence de péchés commis par celui qui en souffrait, ou par ses ancêtres, la guérison ne pouvait pas avoir lieu sans que Dieu ne remette ces péchés. Aussi, lorsque Jésus dit à un malade guéri que ses péchés sont remis, ce n'est pas parce qu'il s'octroierait un pouvoir quelconque, ce n'est qu'une constatation, mais que des gens qui n'ont pas été très attentifs au déroulement des opérations peuvent avoir mal interprété. Et c'est sans doute ce qui s'est passé, dans ces premiers temps. Soit des témoins qui ont mal compris, soit les déformations inévitables quand les nouvelles sont colportées par le bouche à oreille, aidés aussi par la mauvaise volonté de ceux qui se sentent remis en cause dans le confort de leurs petits pouvoirs, tous ceux qui sont plutôt prêts à être jaloux qu'à se laisser saisir par un vent de renouveau. C'était inévitable, c'est dans l'ordre des choses de ce monde, les bonnes nouvelles provoquent forcément un réaction dans l'inertie, et l'enthousiasme du printemps galiléen ne pouvait pas échapper à cette règle.

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