Partage d'évangile quotidien
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Un grand séisme

Lun. 10 Avril 2023

Le ridicule de témoins témoignant qu'ils ne peuvent rien savoir mais qu'ils sauraient quand même de source sure...


Matthieu (27, 64) est le seul à parler de gardes ou gardiens, qui auraient été placés devant le tombeau par "les grands prêtres", au cas où les disciples auraient voulu dérober le corps pour faire croire à sa résurrection... on les retrouve donc logiquement ici, devenus "comme morts" par la venue d'un ange, et contraints par les mêmes grands prêtres de devenir des témoins d'événements qui se seraient passés pendant leur sommeil (!) : rien que le ridicule de témoins témoignant qu'ils ne peuvent rien savoir mais qu'ils sauraient quand même de source sure, témoigne de ce qu'on doit penser de cette histoire... Par contre, que Matthieu soit allé l'inventer nous renseigne sur un point : le corps avait effectivement bel et bien disparu, ce point-là n'était pas contesté.

Là où les quatre évangélistes sont d'accord, c'est sur le fait que ce sont des femmes qui, les premières, ont constaté cette disparition, et qu'à ces femmes est ou sont apparu(s) un ou des anges. Dans les synoptiques, cet ou ces ange(s) leur annonce(nt) que Jésus "a été relevé" (sous-entendu : "par Dieu", et non pas qu'il "s'est" relevé ou réveillé, comme le disent toutes les traductions françaises !  la forme verbale est au passif, ce qui signifie que c'est bien Dieu qui est ici l'auteur de cet événement). Les femmes ont donc été, les premières, témoins de la résurrection. Paul, dont de nombreuses lettres sont considérées comme bien antérieures aux évangiles, ne parle jamais de ce fait ; que les évangiles les rappellent leur donne alors une très forte probabilité — pour ne pas dire certitude — d'historicité.

Maintenant une autre question se pose : est-ce que cette résurrection de Jésus par Dieu est le plus important ? Est-ce qu'à elle seule, elle suffit à expliquer l'essor et le succès ultérieur du christianisme ? Il semble que non, il semble que si les choses s'en étaient arrêtées là, il y a longtemps que ce fait serait resté comme une anecdote, peut-être curieuse et singulière, mais sans plus de conséquences : un corps a disparu, quelques personnes prétendent même avoir rencontré le mort bien vivant, on peut expliquer tout ça de manière très rationnelle, avec des scénarios du type de celui des grands prêtres pour la disparition du corps, et des hallucinations causées par le chagrin pour les apparitions...

Ce qui a fait la différence, ce qui a fait que ces premiers témoins ont été convaincants quand ils ont parlé de tous ces faits, c'est ce qu'ils ont appelé ensuite la "venue de l'Esprit". Des évangélistes, seuls Luc et Jean en parlent. Luc en a créé un événement communautaire fondateur, très symbolique, avec langues de feu (éclairs ?), coup de tonnerre, etc., qui est commémoré depuis lors chaque année cinquante jours après Pâques. Jean (20, 22) dit seulement que, au soir de la découverte du tombeau vide et de son apparition à Marie Madeleine, Jésus apparaît "aux disciples" et "il souffle et leur dit : « Recevez l'Esprit Saint »" ; mais Jean est en réalité le grand théoricien de cette venue de l'Esprit, c'est chez lui que Jésus l'a annoncée avant sa mort, et en a longuement théorisé le rôle.

C'est en fait la venue de l'Esprit en nous qui nous permet, chacun.e, en nous laissant habiter par lui, de vivre à notre tour, et à notre mesure, ce qu'a vécu Jésus : la paternité de Dieu, son incarnation, et plus si affinités ; c'est là le vrai "séisme".

 


Après le sabbat,
    le premier de la semaine commence à briller,
viennent Marie la Magdaléenne
    et l'autre Marie,
voir le tombeau.

Et voici : survient un grand séisme,
car un ange du Seigneur descend du ciel,
    s'approche, roule la pierre
    et s'assoit dessus.
Son aspect est comme l'éclair,
    son vêtement, blanc comme neige.
Pris de crainte devant lui,
    les gardiens sont séismés :
ils deviennent comme morts.

    L'ange intervient et dit aux femmes :
« Pour vous, ne craignez pas :
je sais bien que vous cherchez Jésus,
    qui fut mis en croix.
Il n'est pas ici,
    car il a été relevé, comme il l'avait dit.
Venez, et voyez le lieu où il était posé.
Vite, allez dire à ses disciples :
    “Il s'est réveillé d'entre les morts.
Voici, il vous précède dans la Galilée :
    là vous le verrez.”
Voilà, je vous ai dit. »

Elles s'en vont vite, du sépulcre.
    Avec crainte et grande joie,
elles courent annoncer à ses disciples.

Et voici, Jésus les rencontre.
Il dit : « Salut ! »
Elles s'approchent,
    elles lui saisissent les pieds,
    et se prosternent devant lui.
    Alors Jésus leur dit :
« Ne craignez pas.
Allez annoncer à mes frères
    qu'ils s'en aillent dans la Galilée :
là, ils me verront. »

Comme elles vont,
    voici : certains de la garde viennent dans la ville,
ils annoncent aux grands prêtres
    tout ce qui est arrivé.
Ceux-ci se rassemblent avec les anciens
    et tiennent conseil.
Ils donnent suffisamment d'argent aux soldats,
    en disant :
« Dites : “Ses disciples, venus de nuit,
    l'ont volé, pendant que nous étions endormis.”
Et si ceci était entendu par le gouverneur,
    nous le convaincrons nous-mêmes,
et nous ferons que vous ne soyez pas inquiétés. »

Ils prennent l'argent
    et font comme on leur a enseigné.
Et cette parole s'est divulguée chez des Juifs
    jusqu'aujourd'hui...

(Matthieu 28, 1-15)

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