Du bon et des biens
Quelqu'un s'approcha de Jésus et lui dit : « Maître, que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle ? » Jésus lui dit : « Pourquoi m'interroges-tu sur ce qui est bon ? Il n'y a qu'un seul être qui soit bon ! Si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements. —
« Lesquels ? » lui dit-il. Jésus reprit : « Tu ne commettras pas de meurtre. Tu ne commettras pas d'adultère. Tu ne commettras pas de vol. Tu ne porteras pas de faux témoignage. Honore ton père et ta mère. Et aussi : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »
Le jeune homme lui dit : « Tout cela, je l'ai observé : que me manque-t-il encore ? » Jésus lui répondit : « Si tu veux être parfait, va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres, et tu auras un trésor dans les cieux. Puis viens, suis-moi. »
A ces mots, le jeune homme s'en alla tout triste, car il avait de grands biens.
Comme souvent, Matthieu est assez malhabile dans sa façon d'agencer le matériau dont il dispose. Le questionneur qui, au départ, est simplement "quelqu'un", devient soudainement un "jeune homme". Plus gênant : là où Marc et Luc ont "Bon maître, que dois-je faire ..." Matthieu déplace ce 'bon' : "Maître, que dois-je faire de bon ...". Du coup, la réponse de Jésus "il n'y a qu'un seul être qui soit bon" perd de sa pertinence.
Mais nous aurions tort de nous arrêter à ces bizarreries matthéennes. Remarquons pour commencer, et cette particularité est propre à Matthieu, que Jésus ne semble pas répondre exactement à la question qui lui est posée. Le jeune homme lui demande comment 'avoir la vie éternelle', Jésus lui répond comment 'entrer dans la vie'. Plus question d'éternité ?
Le premier raisonne sur le mode de l'avoir, comme nous le faisons d'ailleurs tous en pensant à une vie après cette vie et qui serait nôtre, définitivement. Jésus, lui, parle d'une manière d'être. Si cette vie est éternelle, il n'est pas question d'attendre un événement quelconque extérieur qui nous permettrait d'y accéder. Eternelle, elles est de tout temps, y compris d'aujourd'hui.
Alors, comment ? Un minimum de moralité semble évident. Et quoi d'autre ? Eh bien, juste de le vouloir vraiment. La vie éternelle est une façon d'être dans la vie, pas un avoir, et tant qu'on est entravé par l'avoir ... Débarasses-toi de tout ce que tu as, et tu y seras. Ce n'est pas qu'il soit difficile aux riches d'entrer dans le royaume, c'est juste impossible.
Et si tu prétends que tu ne tiens pas à tes richesses, mais que tu n'es pas capable de t'en débarrasser, tu es juste un menteur. Tu te mens à toi-même. Notre jeune homme, lui, au moins, s'en était rendu compte.
Commenter cet évangile