Partage d'évangile quotidien
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Veiller, ou agir ?

Jeu. 31 Août 2023

Nous sommes dans ce qu'on appelle généralement le discours eschatologique, un ensemble de paroles censées donner des indications sur ce qu'il se passera, après la mort de Jésus, lors de la venue du royaume. Il est difficile de savoir ce qui, dans les différentes parties de ce "discours", peut réellement être attribué à Jésus et ce qui vient plutôt des premiers chrétiens.

On remarquera déjà que cette venue du royaume, considérée comme un évènement commun, unique, pour toute l'humanité, voire pour l'univers entier (univers, dans le sens de ce qui était considéré comme tel à cette époque), semble contradictoire avec ce qu'il dit par ailleurs, que le royaume est en nous, au présent. On remarquera aussi que cette venue, considérée comme un évènement unique, semble associée à un "retour" de Jésus, dont on peut se demander s'il fait allusion à son retour de la mort (les apôtres lui diront alors : c'est donc maintenant que tu vas instaurer ton royaume ?), ou à ce second retour, qu'il est censé faire "à la fin des temps", depuis que ses apparitions ont cessé ?

Et face à toutes ces interrogations, on peut finalement se demander si Jésus est bien à l'origine de ce discours. Comment lui-même envisageait-il vraiment ces questions, comment a-t-il pu éventuellement évoluer dans de telles conceptions ? Croyait-il déjà à sa propre résurrection telle qu'elle s'est passée ? il n'y a là rien d'évident : quand il controverse avec les sadducéens sur ce sujet, la foi qu'il affirme est que Abraham, Isaac et Jacob sont vivants pour toujours pour Dieu, mais rien ne permet de penser que Jésus croit que c'est d'une vie corporelle : ils sont vivants, puisque Dieu parle d'eux au présent, ils sont vivants au moins dans sa pensée et son cœur (c'est la même chose en anthropologie hébraïque), mais c'est tout. Et quand, sur la croix, il s'écrie "mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?", il est bien possible, sinon probable, que c'est parce qu'il a le sentiment de s'être trompé, que c'est le cri d'un dont tout ce qu'il avait cru s'avère erroné.

Ceci n'est pas certain non plus. Peut-être Jésus était-il quand même sûr que, pour le moins, il rejoindrait Abraham, Isaac et Jacob présents au Père, mais qu'il n'imaginait absolument pas que son corps se volatiliserait à l'intérieur du tombeau — ainsi qu'en témoigne très vraisemblablement le linceul de Turin —, et encore moins qu'il pourrait ensuite apparaître à ses disciples avec toutes les propriétés d'un corps ayant la capacité, apparemment, de se matérialiser et dématérialiser à volonté...

Il semble alors pour le moins que cette seconde venue de Jésus, coïncidant avec l'avènement d'un royaume considéré comme un évènement unique — ce retour et ce royaume attendus pour une hypothétique fin des temps — n'a pu d'aucune façon être prévue par l'intéressé lui-même de son vivant. Quant à ce qu'il a pu envisager et prédire lors de ses apparitions, c'est plutôt ce qu'on trouve dans les finales des évangiles : "simplement" sa présence au monde pour toujours.

Il ne s'agit donc pas d'attendre, de veiller, il s'agit de vivre, dans un royaume d'amour à la fois déjà là et à faire grandir, sans limitations d'espace ni de temps.

 

 

Veillez donc !
    car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur vient.
Cela, comprenez-le donc,
que si le maître de maison avait su
    à quelle heure de la nuit vient le voleur,
il aurait veillé
    et n'aurait pas laissé perforer sa maison.
C'est pourquoi vous aussi soyez prêts !
    car c'est à l'heure que vous ne pensez pas
que le fils de l'homme vient.
    
Qui donc est-il le serviteur fidèle et avisé,
que le seigneur a établi sur sa maisonnée
    pour leur donner la nourriture en son heure ?
heureux ce serviteur-là !
    qu'en venant son seigneur trouvera à faire ainsi ;
amen ! je vous dis
    que sur tous ses biens il l'établira.
    
Mais si, méchant, ce serviteur disait en son cœur :
"Mon seigneur tarde",
    et qu'il commençait à frapper ses co-serviteurs,
    puis qu'il mange et boive avec les ivrognes,
viendra le seigneur de ce serviteur-là
    un jour où il ne s'y attend pas
    et à une heure qu'il ne prévoit pas,
et il le taillera en pièces
    et il fixera sa place avec les impies :
là sera le pleur
    et le grincement des dents.

(Matthieu 24, 42-51)

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