Partage d'évangile quotidien
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Personne ne monte au ciel...

Mar. 9 Avril 2024

...s'il n'en est d'abord descendu : nous parlons de ce que nous savons et nous témoignons de ce que nous avons vu, vous avez à naître d'en haut.

"Personne n'est monté au ciel sinon celui qui est descendu du ciel, le fils de l'homme" : cette phrase est censée parler de Jésus. Non pas tant parce qu'elle contient l'expression "le fils de l'homme", laquelle est un sémitisme qui, ici, signifierait normalement et simplement "moi". Mais comment Jésus pourrait-il dire à Nicodème, de son vivant, qu'il est "monté au ciel" ? il est donc certain qu'il s'agit là d'un commentaire de l'évangéliste, et non de paroles prononcées par Jésus lui-même ; c'est l'évangéliste qui se lance dans de la théologie à la suite des paroles qui précèdent et qui, elles, peuvent être attribuées à Jésus.

Effectivement, comment justifier cette prétention de Jésus à pouvoir dire les "choses célestes" ? il faut pour cela qu'il vienne du ciel, qu'il connaisse le ciel, qu'il en descende, soit en fait simplement qu'il soit lui-même né d'en haut, né de l'esprit, comme il vient d'enseigner à Nicodème de le faire lui aussi. Naître d'en haut : l'expression est comprise dans la doctrine officielle comme signifiant qu'on va recevoir quelque chose qu'on n'avait pas jusque là ; c'est le baptême, qui nous conférerait une dimension divine qui ne ferait pas partie de notre nature initiale.

Mais alors, tous les enfants qui meurent en bas âge avant d'avoir pu être baptisés, tous ceux qui naissent hors de la chrétienté, sont donc damnés, le salut leur est à jamais inaccessible ? C'était en tout cas la raison pour laquelle, jusque dans le milieu du siècle dernier, on baptisait les nouveau-nés à un, deux ou maximum trois jours après leur naissance ! Cependant, devant l'énormité de l'injustice, de tous ceux qui n'avaient eu aucune chance de pouvoir être baptisés sans qu'ils n'y soient pour rien, on avait trouvé comme parade la notion de baptême de désir : si, fictionnellement parlant, en supposant que leurs conditions de naissances avaient été autres, optimales, ils auraient choisi d'être baptisés, alors on pouvait considérer qu'ils étaient comme réellement baptisés...

N'est-il quand même pas plus simple de considérer qu'en fait, la nature divine fait partie de notre condition humaine à tous ? La question n'est pas d'acquérir une nature que nous n'aurions pas initialement, mais, ce qui est déjà beaucoup, de naître à cette nature. Acquérir une telle nature qui ne nous serait pas innée, c'est un peu comme de prétendre transformer une pierre en plante ou un singe en homme (et ne parlons pas du Golem...). Par contre, il n'est pas gagné d'avance que l'être humain se comporte autrement que comme l'animal, ni même pire que lui. C'est cela, naître d'en haut, naître de l'esprit. On ne reçoit rien de plus que ce qu'on est dès les origines. C'est d'ailleurs ce que dit le récit de la création de l'être humain dans la Genèse : YHWH insuffla son esprit dans de la glaise façonnée en forme d'homme, l'esprit est bien là présent en nous comme condition même de notre existence.

Que cela nous plaise ou non, nous sommes de nature divine ; mais aussi de nature terrestre, évidemment. Un drôle de mélange, peut-être, mais c'est ainsi. Qu'en faisons-nous ?

 

 

« ne t'étonne pas que je t'aie dit
    "vous avez à naître d'en haut"
l'esprit où il veut souffle
    et sa voix tu l'entends
mais tu ne sais d'où il vient ni où il va
ainsi de quiconque est né de l'esprit »
    Nicodème a répondu et lui a dit
« comment cela peut-il se produire ? »
    Jésus a répondu et lui a dit
« tu es l'enseignant d'Israël et tu ne connais pas ces choses ?

amen amen je te dis que
    nous parlons de ce que nous savons
    et nous témoignons de ce que nous avons vu
et notre témoignage vous ne le recevez pas !
je vous ai dit les choses terrestres
    et vous ne croyez pas
alors si je vous dis les choses célestes
    comment croirez-vous ?
mais personne n'est monté au ciel
    sinon celui qui est descendu du ciel
le fils de l'homme

et comme Moïse a haussé le serpent dans le désert
    de même aura à être haussé le fils de l'homme
afin que quiconque croit en lui
    ait vie éternelle »

(Jean 3, 7-15)

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