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Dans la vraie vie

Mer. 15 Mai 2013

Jean 17, 11-19 traduction : Comparer plusieurs traductions sur le site 4evangiles.fr Lire le texte grec et sa traduction (anglaise) mot-à-mot sur le site interlinearbible.org

« Je ne suis plus dans le monde. Et eux sont dans le monde. Et moi, je viens vers toi. Père saint, garde-les en ton nom que tu m'as donné pour qu'ils soient uns comme nous. 

« Quand j'étais avec eux, moi je les gardais en ton nom que tu m'as donné et j'ai veillé et aucun d'eux ne s'est perdu sinon le fils de la perdition en sorte que l'Écrit s'accomplisse. Mais maintenant je viens vers toi et je parle ainsi dans le monde pour qu'ils aient en eux ma joie en plénitude. 

« Moi, je leur ai donné ta parole, et le monde les a pris en haine, parce qu'ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde. 

« Je ne prie pas pour que tu les enlèves du monde, mais pour que tu les gardes du mauvais. Ils ne sont pas du monde comme moi je ne suis pas du monde. Sanctifie-les dans la vérité : ta parole est vérité. Comme tu m'as envoyé dans le monde, moi aussi je les ai envoyés dans le monde. Et pour eux je me sanctifie afin qu'ils soient eux aussi sanctifiés en vérité. » 

 

 

Le songe de Jacob, par He-Qi

 

 

voir aussi : La pure vérité, Mondanités, Ta Parole est Vérité

La notion du 'monde' chez Jean signifie simplement la différence entre ceux qui ont trouvé le Père et ceux qui ne le connaissent pas. Les disciples sont "dans le monde", comme tout le monde, mais ils ne sont plus "du monde" puisqu'ils ont découvert qu'ils viennent de Dieu, tandis que ceux qui ne l'ont pas découvert sont dits être "du monde" puisqu'ils pensent que c'est de là qu'ils viennent. Bien sûr, nous venons aussi tous du monde, il ne s'agit pas ici de prétendre que l'on puisse naître par la seule "opération du saint Esprit" ! Le monde entier vient de Dieu, le monde entier est habité par l'Esprit, mais nous n'en sommes pas tous conscients. Au fond, c'est une question très actuelle, particulièrement pour nous qui vivons dans les pays dits 'avancés', où, justement, cette conscience de l'existence de Dieu devient de plus en plus le cadet des soucis de la plupart des gens.

À l'époque de Jésus, la question n'était pas la même. Dieu, tout le monde y croyait, peu ou prou. Il n'était guère concevable de penser autrement, cela faisait partie du consensus de base. Par contre ce dieu se tenait hors du monde. Si c'était bien lui qui l'avait fait, il en était distant, intervenant à la rigueur de temps en temps du bout des doigts, par l'intermédiaire d'un de ses prophètes par exemple. On comprend que le message de Jésus avait peu de chances d'être entendu ! C'était vraiment encore pire que la révolution coppernicienne, il faudrait sans doute plutôt chercher du côté de la physique quantique pour avoir un élément de comparaison. C'était proprement incompréhensible pour le commun des mortels, et on sait bien qu'effectivement personne n'a compris sur le moment. La plupart lui ont laissé le bénéfice du doute, prenant en compte les 'œuvres', les signes. Quelques uns l'ont accusé de se prendre pour Dieu, on ne peut pas vraiment le leur reprocher...

C'est de ce constat que nous sommes obligés de conclure que la "venue de l'Esprit" a été une réalité bien tangible. Nous ne pouvons pas vraiment dire quelle forme elle a pris. Il y a peu de chances qu'elle se soit produite soudainement, collectivement, et pour tous, comme le décrit Luc dans son récit de la Pentecôte. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il s'est passé quelque chose au cours et au long de ces premières années qui ont suivi la mort de Jésus, pour que ses paroles aient commencé d'être comprises. Bien sûr, cela est resté très mélangé. C'est normal, même les révélations les plus éblouissantes n'effacent pas d'un coup de baguette magique tout l'appareil et les habitudes de pensée dont on a été dépendant toute sa vie auparavant ! À côté, donc, d'une communauté johannique qui s'est longtemps gardée de cette identification de Jésus avec Dieu qui est devenue, paradoxalement, la norme ultérieure, on pouvait trouver toute une diversité d'opinions et de sensibilités, comme on en trouve encore dans les lointaines héritières de ces premières communautés que sont nos églises.

C'est dommage, quand même, que la théorie du Fils unique, et celle de la Trinité, qui en découle, soient devenues ce que nous connaissons, ces dogmes imposants et difficilement contestables. Je crois sincèrement, pour ma part, qu'on perd par là énormément de la richesse de Jésus. Ce n'est pas un hasard si, à côté de la menace que représentait son action pour les intérêts financiers et le pouvoir des sadducéens, mais qui n'en était qu'une conséquence secondaire, le seul reproche sur le fond qui lui était adressé était justement ce que cette majorité qui se dit son héritière a cru bon, quant à elle, de réclamer pour lui : l'égal de Dieu ! Lui s'en est défendu. Ceux qui veulent le lui mettre sur le dos arguent que ce n'était que par humilité : drôle d'humilité qui consisterait à refuser d'admettre tout haut ce que l'on pense très fort tout bas ! Ou encore qu'il ne voulait pas le dire parce que le monde n'était pas prêt à l'entendre : un peu facile, à ce compte-là on peut aussi lui faire endosser n'importe quelle lubie qui nous passe par la tête, et c'est bien ce que nous faisons d'ailleurs le plus souvent, puisque, n'est-ce pas, il n'est plus là pour nous contredire...

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