Partage d'évangile quotidien
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Signes des temps

Lun. 15 Octobre 2012

Luc 11, 29-32 traduction : Comparer plusieurs traductions sur le site 4evangiles.fr Lire le texte grec et sa traduction (anglaise) mot-à-mot sur le site interlinearbible.org

Comme la foule s'amassait, Jésus se mit à dire : « Cette génération est une génération mauvaise : elle demande un signe, mais en fait de signe il ne lui sera donné que celui de Jonas. Car Jonas a été un signe pour les habitants de Ninive ; il en sera de même avec le Fils de l'homme pour cette génération. 

« Lors du Jugement, la reine de Saba se dressera en même temps que les hommes de cette génération, et elle les condamnera. En effet, elle est venue de l'extrémité du monde pour écouter la sagesse de Salomon, et il y a ici bien plus que Salomon. 

« Lors du Jugement, les habitants de Ninive se lèveront en même temps que cette génération, et ils la condamneront ; en effet, ils se sont convertis en réponse à la proclamation faite par Jonas, et il y a ici bien plus que Jonas. » 

 

 

Le cantique de Salomon, par He-Qi

 

 

voir aussi : Témoins à charge, Génération perdue, Lumières des nations, Signal lumineux, Génération condamnée, Le signe

Certainement Jésus eut-il plus d'une fois, au cours de sa 'carrière', l'occasion de s'exaspérer du peu de succès réel remporté par sa prédication. Mais il est à peu près certain que ses plus grandes déceptions vinrent du cercle de ses proches, de ses 'disciples', et non des pharisiens, scribes et sadducéens, qui, eux au moins, dans leur ensemble, ne lui laissèrent pas vraiment le temps de se faire trop d'illusions.

Matthieu, dans sa version de ce passage, le présente comme une réponse faite à un groupe de pharisiens et de scribes. C'est possible. Nous sommes dans le cadre d'une controverse dans une culture où l'enflure du discours et des arguments fait partie de la règle du jeu. C'est l'éloignement de cette culture qui a pu transformer, à tort, ce qui n'était que figures de style en antisémitisme spécifiquement chrétien. Ceci n'est pas nécessairement imputable aux premières communautés ni aux évangélistes qui écrirent pour elles et en leur nom.

En revanche, on peut leur reprocher d'avoir minimisé leurs propres insuffisances. Pas complètement, il faut le leur reconnaître, soit parfois qu'ils ne l'auraient pas pu, les faits étaient trop connus, soit encore que ça ne tirait pas à conséquences. Mais quand on voit le même Matthieu, par exemple, transformer l'interdiction faite par Jésus de dire qu'il serait le messie, en félicitations de Pierre pour sa 'proclamation de foi', on mesure le fossé entre la bonne opinion d'eux-mêmes que se sont accordée les premiers chrétiens, et nous à leur suite, et la réalité de ce que pensait Jésus à leur sujet.

Et là encore, on ne peut pas vraiment le leur reprocher. Ils sont comme tout le monde, avec une tendance à un peu plus d'indulgence pour soi-même que pour les autres. Ils n'ont sûrement pas mesuré toutes les conséquences qu'auraient leurs omissions, et comment l'auraient-ils pu, si tant est d'ailleurs qu'ils aient vraiment été conscients de leurs petites trahisons. Ils ont fait de leur mieux. Mais nous, qui arrivons vingt siècles plus tard, et qui avons maintenant les moyens de reconstituer peu ou prou la réalité de ce qui s'est passé, au moins dans les grandes lignes, nous n'avons plus d'excuses.

La génération contre laquelle témoigneront et la reine de Saba, et les habitants de Ninive, c'est la notre, si nous refusons de voir les signes de notre temps. Si nos assemblées se désertifient, s'il ne reste presque plus dans nos églises que de 'savantes et grandes gens', est-ce vraiment parce que "cette foule ne connaît pas la Loi, ce ne sont que des maudits" (Jean 7, 49) ? Sont-ce si certainement que ça les sirènes du matérialisme et de l'hédonisme, la faute des médias, et la victoire de Satan, mélangez bien le tout et tirez le premier tiquet au hasard ?

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